La vente à réméré, également connue sous le nom de « vente avec faculté de rachat », est un mode de financement hybride risqué. Elle est à la croisée de chemins entre la vente immobilière et le financement. D’une vente à réméré permet à un propriétaire en difficulté financière de vendre son bien immobilier pour recevoir des liquidités tout en conservant la possibilité de lever une option de reprise à un terme convenu. Cette option est particulièrement utile pour les propriétaires confrontés à des difficultés financières importantes, telles que le surendettement ou la saisie immobilière. Dans cet article, nous examinerons tout d’abord le cadre juridique entourant la vente à réméré, puis nous aborderons les droits dont bénéficient les propriétaires engagés dans ce mode de financement hybride risqué, avec ses points de vigilance.
1️⃣ La vente à réméré, une opération juridique hybride risquée entre une vente immobilière et une opération de financement
Des dispositions légales spécifiques du Code civil encadre la vente à réméré. Ce mécanisme trouve ses origines au Moyen-Âge et a été légalisé par Napoléon pour refinancer les valeurs immobilières auprès des banques. Ces dispositions visent à définir et à encadrer l’opération de vente pour protéger chaque partie impliquée.
Voici les principaux éléments du cadre juridique de la vente à réméré :
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Un acte authentique : la vente à réméré est réalisée par acte authentique signée devant un Notaire. Elle réunit un propriétaire, le vendeur, et un acquéreur, qui va financer l’opération. Ce contrat doit mentionner clairement les conditions de son exécution. Il faut que figurent la durée du réméré et les modalités de reprise du bien au terme de cette durée. Les avantages de cette opération incluent la possibilité de sortir de situations délicates et de poursuivre des projets, tandis que les inconvénients peuvent inclure des risques financiers et des conditions contractuelles strictes.
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Le délai de réméré : correspondant à la période durant laquelle le vendeur conserve la faculté de lever l’option aux fins de reprise de son bien immobilier. La durée légale maximum du réméré est de 5 ans. En pratique, cette durée varie entre 18 mois et 3 ans. Les parties fixent librement la durée du réméré durant les négociations qui précèdent la signature de l’acte de vente.
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La « faculté de rachat » : est un abus de langage. Il est juridiquement faux de parler de « rachat« . En effet, en cas de « rachat », l’administration fiscale serait en droit de réclamer de nouveaux droits de mutation. Pour éviter cet écueil, la « faculté de rachat » consiste en réalité en une option qui provoque l’annulation de la vente à réméré. Pour pouvoir exercer cette option, le vendeur doit payer le prix de « rachat » fixé au moment de la signature du contrat de vente. Parallèlement, l’acquéreur doit garantir la restitution du bien au vendeur si ce dernier exerce son option conformément aux conditions convenues. La faculté de rachat exclusive permet ainsi au vendeur de racheter son bien une fois ses dettes remboursées, tout en continuant à occuper le bien moyennant une indemnité d’occupation.
2️⃣ La vente à réméré, source de clauses abusives et de nullité
La vente à réméré est strictement encadrée par le Code civil en raison de sa complexité et des atteintes au droit du propriétaire qu’elle peut générer.
- Le droit de propriété est perdu : le vendeur perd la propriété de son bien lorsque l’acte de vente à réméré est signé. L’immeuble devient la propriété exclusive de l’acquéreur qui a financé l’opération. Cette solution peut être envisagée par les propriétaires en proie à des difficultés financières importantes.
- Le prix de vente ne doit pas être anormalement bas : certes, la vente à réméré, parce qu’elle constitue une opération risquée pour l’acquéreur qui peut perdre le bien à terme, induit un prix de vente inférieur à la valeur de marché. Toutefois, le prix de vente ne doit pas être lésionnaire. Le vendeur ne doit pas être lésé à hauteur de 7/12e du prix de vente. En moyenne, le prix de vente à réméré équivaut à 65 % de la valeur de marché. Cette opération permet également de restructurer les dettes des propriétaires.
- L’indemnité d’occupation doit être raisonnable : le vendeur bénéficie souvent de l’autorisation d’habiter le bien durant la période de réméré. Cette autorisation d’occupation est assortie d’une indemnité. Le montant de cette indemnité d’occupation est pondérée. La nature de l’opération, le prix de vente et la valeur locative moyenne pratiquée dans le voisinage sont pris en compte. Si l’indemnité d’occupation est trop élevée, elle peut dissimuler un financement à un taux usuraire. Le taux d’usure correspond au taux d’intérêt maximum légal qu’un prêteur peut appliquer. Il a été jugé » que la vente à réméré peut constituer un pacte commissoire prohibé lorsque, portant sur la résidence principale du vendeur, elle dissimule une opération de crédit et a pour objet d’éluder les dispositions protectrices des emprunteurs relatives au taux d’usure. » (Cass. 3e Civ., 24 juin 2021, n° 18-19771). La vente est annulée si elle enfreint ces règles. La vente à réméré permet également d’éviter une saisie immobilière désavantageuse.
La vente à réméré constitue une option intéressante pour un propriétaire en difficulté financière qui souhaite racheter son bien. Cependant, il est important de considérer les risques financiers associés à cette pratique.
Elle lui permet de bénéficier de liquidités importantes et immédiatement. Toutefois, l’avenir doit être certain. Ainsi, le propriétaire doit avoir des perspectives de rentrées d’argent à court ou moyen terme. À défaut, il perd le pouvoir d’exercer son option ou sa « faculté de rachat ». À défaut, il risque de perdre définitivement tout droit sur le bien immobilier. Si les conditions sont réunies, la nullité de l’opération peut être poursuivie.
L’accompagnement d’un Avocat en droit bancaire est essentiel pour vous défendre dans ce mécanisme complexe. En outre, la représentation en Justice est obligatoire pour obtenir la nullité de la vente.